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 Etude et documents

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Jeanne O'Venilli
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MessageSujet: Etude et documents   Etude et documents EmptyMer 11 Juin 2014 - 11:39

Jeanne jeta un regard mélancolique sur sa vieille voiture. Elle ne pouvait plus conduire, aujourd’hui, et le regrettait beaucoup. Combien d’heures avait-elle passé à sillonner les routes de son pays d’adoption en tout sens ? Elle se rappelait ces matins, à l’aube, où elle et son mari terminaient de charger la voiture, en criant pour que les enfants arrêtent leurs bêtises et grimpent enfin dedans. Ce petit frisson lorsqu’ils démarraient, en route pour de longues journées de rire et de soleil, où les enfants couraient en tout sens en se chamaillant avant de revenir vers eux, les joues rouges et les cheveux ébouriffés, et elle les serrait dans ses bras avec amour, pendant que son mari appelait tout le monde à table, qu’il n’était plus l’heure de jouer mais de se remplir l’estomac.

Le temps avait fait son œuvre. Ses vieux os ne la laissaient effectuer que des voyages assez courts, les grandes expéditions d’une semaine ou deux étaient terminées. Son époux avait rejoint les anges, après une longue et douloureuse maladie. Ses enfants s’étaient à leur tour mariés et avaient eu des enfants. Et elle restait là, pas encore trop vieille, mais plus trop jeune, à continuer sa vie dans cette nouvelle hère, où tant de choses avaient changé en si peu de temps. Elle serra son sac contre elle en s’asseyant dans le car, qui partait devant le commissariat de Forks. C’était une navette pour Port Angeles, d’où elle prendra le train pour se rendre à Seattle. Toujours dans l’iodée d’aider et de soutenir chaque projet, chaque jeune, chaque vieux, chaque enfant, elle avait répondu à l’annonce d’une étudiante en droit qui recherchait de vieux documents. Et de cela, Dieu sait que Jeanne en avait pléthore. Journaux de guerre, photos, coupures de magazine, lettres, ainsi que ses propres souvenirs, cachés dans sa mémoire.

Plus les années passaient, et plus la vieille femme se surprenait à songer au temps passé. Etait-ce incontournable, pour une grand-mère, de penser au temps où elle-même était jeune ? Ou du moins, à un certain temps. Le temps où elle était libre et heureuse, où elle pouvait croquer la vie à belle dents. Le temps où elle pouvait encore faire tourner bien des têtes au bal, où sa vie entière s’étendait devant elle. Elle soupira légèrement alors que le bus quittait Forks en emmenant ses passagers. Elle dormit un peu durant le trajet, puis dû se hâter pour ne pas manquer son train. Une fois assise à l’intérieur, elle sortit un carnet puis dessina. Elle dessina chacun de ses enfants, d’abord jeunes, puis plus âgés, et passa par la suite à ses petits-enfants. Elle était fière d’eux tous, heureuse d’avoir une si belle et grande famille. Heureuse d’avoir survécu à de grandes horreurs du siècle précédent et d’avoir pu accéder à la joie de la maternité, d’avoir vu ses enfants grandir et devenir parents. Joies simples, mais qui suffisaient à combler toute une existence.

Arrivée à Seattle, elle se rendit à petits pas vers le café où avait lieu son rendez-vous, tenant fermement son sac. Personne ne faisait attention à elle, dans cette grande ville. D’ailleurs, personne ne faisait attention à personne tout court. C’était l’une des maladies du vingt-et-unième siècle, cet anonymat permanent. Où était passé les quartiers vibrants de vie où tout le monde connaissait ses voisins ? Elle rentra dans le café, et remercia d’un signe de tête le jeune homme qui s’était écarté pour la laisser passer. Le patron du bar se faufila habilement entre plusieurs clients qui sortaient et lui désigna une table.

PatronQue prendrez-vous, madame ?
JeanneUn café long, s’il vous plaît.

Elle s’assit et déposa son manteau. Peu de temps après, son rendez-vous arriva. C’était une toute jeune femme, qui ne devait pas avoir plus de trente ans, selon Jeanne. Elle lui fit signe puis la salua avec un sourire chaleureux. Les jeunes dégageaient une très grande fraîcheur, c’était agréable. Elle la laissa s’installer avant de reprendre la parole.

JeanneJe m’appelle Jeanne O’Venilli, dit-elle par politesse car son interlocutrice le savait déjà. Ravie de vous rencontrer.

Elle lui tendit la main pour la serrer, alors que son café arrivait.

JeanneQue désirez-vous prendre ? Je peux vous inviter, c’est déjà une belle occasion d’aider une étudiante et d’avoir un peu de compagnie.
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MessageSujet: Re: Etude et documents   Etude et documents EmptySam 14 Juin 2014 - 13:23

Vanessa s’étira longuement, se réveillant avec les cheveux mélangés, ses mèches blondes s’emmêlant les unes aux autres indépendamment de sa propre volonté. Blondes, oui, car elle avait eu une envie subite de changer de couleur. Le brun, c’est terne, même si elle y avait incorporé des mèches de couleur çà et là. Alors, va pour le blond ! Paressant un moment dans son lit, les draps l’entourant de toutes parts, Vanessa finit par se lever en éprouvant plus de difficultés que de coutume. Eh bien ? Elle n’était pas sortie hier pourtant ! Ah heu… Si, en fait. Oui, bon, elle n’avait pas bu énormément, alors où était le mal ? Elle était plus solide que cela, d’ordinaire. Soit ! Aujourd’hui, pas question de flemmarder !

La jeune étudiante avait, depuis quelques semaines, posté une annonce sur un site pour trouver quelqu’un qui accepterait de lui partager des souvenirs de guerre. A son sens, il était primordial de ne pas réitérer les erreurs du passé, de comprendre quel était le véritable déroulement des événements et non pas les rumeurs qui circulaient ou ce que l’on trouve sur Internet. Lors de ses quelques mois passés en France, elle avait vu de nombreux monuments aux morts datant des guerres mondiales. Elle s’était renseignée, naturellement, pour apprendre et ne pas oublier. Trop jeune et indirectement concernée, elle ne savait pas grand-chose car les Espagnols n’étaient que trop peu sensibilisés à toute cette histoire.

Pourquoi se renseigner ici ? Pour avoir un autre point de vue, pour entendre toute l’histoire et être sûre de ne pas être menée en bateau. Déformation professionnelle, que voulez-vous ? Lorsque l’on est trop concerné par un événement ou une situation, notre mémoire occulte certains souvenirs, certaines choses qui pourraient changer la donne. Et ce sont, souvent, les détails qui apportent des informations essentielles lors d’affaires délicates. Des détails qui permettent de changer un jugement, des comparaisons, des exemples du passé. Vanessa s’était basée sur les condamnations suivant les guerres mondiales, des faits, de tout ce que cela avait engendré. Voilà pourquoi elle avait donc posté cette annonce.

Enfilant les premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main, la jeune Espagnole grimpa descendit les escaliers de son immeuble et prit la direction du café dans lequel le rendez-vous avait été fixé. Il était tôt pour elle qui venait de se lever après une nuit très courte, mais l’heure était on ne peut plus normale. Jeanne O’Venilli était une dame âgée qui habitait à Forks. Vanessa avait proposé de se déplacer mais n’avait pas insisté, de peur de brusquer la vieille dame. Arrivant au café désigné, elle entra dans l’établissement et repéra très vite Madame O’Venilli qui était déjà installée à une table. Elles s’étaient donné des signes distinctifs, histoire de ne pas aborder la mauvaise personne et éviter de passer pour une impolie de première catégorie. Vanessa salua son interlocutrice en déclinant son identité, souriant, s’asseyant en face d’elle en déposant sa veste. Ses longs cheveux retombant devant ses yeux, elle ramena ses mèches derrière ses oreilles et croisant les bras après avoir serré la main tendue de Madame O’Venilli.

Mme O’Venilli – Je m’appelle Jeanne O’Venilli. Ravie de vous rencontrer.

La vieille dame avait tout d’une grand-mère gentille et douce, l’air intentionné et attentif. Elle avait vécu et cela se voyait à des kilomètres, mais sa douceur transparaissait grâce au sourire qu’elle arborait. Quel âge avait-elle ? Qu’avait-elle vraiment vécu ? Son maintien, son visage, ses yeux brillants… Tout témoignait d’une vie très riche et bien remplie. Sans oublier l’odeur qu’elle dégageait. Comme sa grand-mère. Une odeur de personne âgée douce et attentionnée, toujours là lorsque l’on a besoin d’elle, toujours à vous attendre avec des gâteaux ou des pâtisseries en vous répétant de « ne pas courir trop vite », de « bien se couvrir parce que les garçons sont vicieux », et toutes ces bonnes paroles. Ses grands-parents l’ayant élevée elle, son frère et sa sœur, Vanessa fut attendrie dès le premier instant et se retrouva propulsée des années en arrière.

Madame O’Venilli – Que désirez-vous prendre ? Je peux vous inviter, c’est déjà une belle occasion d’aider une étudiante et d’avoir un peu de compagnie.

Un serveur vint apporter la commande de son interlocutrice et sembla attendre Vanessa. Ah heu… Bon, vu son état pour le moment, mieux valait un café fort. Très fort. Elle répondit d’abord à Madame O’Venilli :

Vanessa – Merci, mais ne vous sentez pas obligée. C’est déjà un très grand geste que vous accomplissez en acceptant de me parler… Je prendrai un café noir, ou ce que vous avez de plus fort tout du moins. Merci beaucoup.

Cette fois, Vanessa s’était adressée au serveur qui s’en alla en les saluant d’un signe de tête. Reportant son attention sur son interlocutrice, elle espérait que cette dernière n’avait pas été trop épuisée par le voyage. Mais avait-elle le droit de le demander ? Ne risquait-elle pas de la froisser ? Certaines personnes âgées ne supportent pas les questions indiscrètes, celles qui leur montraient qu’elles étaient « vieilles ». Se mordant les lèvres en hésitant quelques instants, Vanessa préféra ne pas prendre le risque et reprit :

Vanessa – Je vous avoue que je ne pensais pas que quelqu’un répondrait à cette annonce. J’ai séjourné un moment en France, je ne suis qu’en Erasmus ici et… Etant Espagnole, nous n’avons pas été touchés de la même manière que les Français, j’ignore pourquoi. Bien sûr, ils m’ont répondu lorsque je suis entrée dans les points d’informations, mais sans doute m’ont-ils prise pour une inculte ou… Peu importe. Quoi qu’il en soit, je voulais apprendre, avoir un point de vue… extérieur ou différent. Quelqu’un qui ne me ménagerait pas par peur du jugement que je pourrais émettre, quelqu’un qui ne chercherait pas à me « protéger ».

Dire une telle chose à une personne âgée qui avait tout de la mamie typique était assez risible, en fin de compte. Vanessa avait l’impression de parler à sa propre grand-mère qui avait passé son temps à la couver le temps de son adolescence, convaincue que sa petite-fille avait mal vécu la perte de ses deux parents. Oui, c’était le cas, mais après ? Elle s’en était bien sortie. Reprenant, Vanessa poursuivit :

Vanessa – Je ne veux pas fermer les yeux. Si je me suis lancée dans le droit, c’est pour rétablir la justice, pour éviter de commettre les erreurs du passé, pour entraver les actions des malfaiteurs ou de telles personnes. C’est pour cette raison que j’ai posté cette annonce… J’ai entendu des témoignages en grand nombre, mais peu de preuves, peu de documents authentiques existent encore sans être censurés. Seulement… Si cela est trop dur, je ne vous oblige à rien, et dites-le-moi sans hésiter si c’est trop… délicat.
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Jeanne O'Venilli
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MessageSujet: Re: Etude et documents   Etude et documents EmptySam 28 Juin 2014 - 12:23

Jeanne prit un sucre dans la petite coupelle pour le mettre dans son café et touiller doucement. Elle avait toujours beaucoup aimé le café. Après après avoir été libérée et sortie de l'hôpital, elle avait commencé par se rendre dans un bar, s'asseyant à une table près de la fenêtre au soleil, simplement émerveillée de ne plus avoir à se cacher, baisser la tête, ou craindre le prochain coup. Elle avait bu u café, le premier d'une longue série. Le breuvage amer et brûlant avait lentement coulé dans sa gorge, et elle avait frémi, réalisant qu'elle était on ne peut plus vivante, que plus rien ne la menaçait. Qu'elle avait survécu. Elle était vivante. Ses deux frères étaient avec elle, ses parents étaient morts, comme tant d'autres... Elle vivait. Aujourd'hui, ce petit café était simple, basique, banal même. Et il lui rappelait plus de souvenirs qu'elle ne l'aurait voulu.

VanessaMerci, mais ne vous sentez pas obligée. C’est déjà un très grand geste que vous accomplissez en acceptant de me parler… Je prendrai un café noir, ou ce que vous avez de plus fort tout du moins. Merci beaucoup.

Jeanne sourit doucement. Un grand geste ? Avec le temps, cette toute jeune femme ne verra plus les choses de la même façon. Elle saura relativiser, ne pas s'inquiéter de certaines affaires. Il fallait qu'elle se préserve pour les causes qui la toucheront le plus, peu importe leurs natures, et qu'elle se batte pour elle. Il existait toujours une chose qui nous faisait vibrer. Elle touilla le contenu de sa tasse en observant son interlocutrice. Elle trouvait cela très bien que des jeunes prennent le temps de faire leurs devoirs de mémoire. Sa,s doute ce seul devoir n'empêche pas que le spires horreurs se répètent, elle en voulait pour preuve, ce qui se passait aujourd'hui dans certains endroits, mais au moins cela aide-t-il à se forger une conscience. Et il est parfois si difficile de comprendre les actes de quelques hommes, de comprendre comment on peut en venir à des choses si cruelles, comment on peut accepter et aider à tant de destruction.

VanessaJe vous avoue que je ne pensais pas que quelqu’un répondrait à cette annonce. J’ai séjourné un moment en France, je ne suis qu’en Erasmus ici et… Etant Espagnole, nous n’avons pas été touchés de la même manière que les Français, j’ignore pourquoi. Bien sûr, ils m’ont répondu lorsque je suis entrée dans les points d’informations, mais sans doute m’ont-ils prise pour une inculte ou… Peu importe. Quoi qu’il en soit, je voulais apprendre, avoir un point de vue… extérieur ou différent. Quelqu’un qui ne me ménagerait pas par peur du jugement que je pourrais émettre, quelqu’un qui ne chercherait pas à me « protéger ».

Jeanne reposa sa cuillère et but une petite gorgée de café. L'Espagne n'avait pas vécu la Seconde Guerre Mondiale de la même façon que le reste de l'Europe, et pour cause. La dictature y était déjà installée, la guerre civile écrasée depuis peu dans le sang, et un voile pudique avait jeté là-dessus, fermant les yeux des citoyens, les rendant sourds aux massacres alors qu'ils avaient eux-même subis des horreurs il y a si peu de temps. On lave son linge sale en famille, comme on dit, et chacun son dictateur. L'Allemagne Nazie, l'Italie fasciste, l’Espagne de Franco. Quelle tristesse.

VanessaJe ne veux pas fermer les yeux. Si je me suis lancée dans le droit, c’est pour rétablir la justice, pour éviter de commettre les erreurs du passé, pour entraver les actions des malfaiteurs ou de telles personnes. C’est pour cette raison que j’ai posté cette annonce… J’ai entendu des témoignages en grand nombre, mais peu de preuves, peu de documents authentiques existent encore sans être censurés. Seulement… Si cela est trop dur, je ne vous oblige à rien, et dites-le-moi sans hésiter si c’est trop… délicat.

Jeanne secoua la tête. Des personnes comme cette petite, elle en avait rencontré des dizaines au cours de sa vie. Des dizaines de personnes avaient pris cette cause à bras-le-corps pour traquer les criminels de guerre et les traîner devant la justice. Beaucoup y avaient consacré leurs vies entières. Les survivants avaient été interrogés des dizaines de fois, Jeanne elle-même avait assisté à plusieurs procès, parfois ne simple spectatrice, parfois en qualité de témoin. Mais jamais, jamais elle n'avait pu retourner sur les lieux des différents camps... Cela était encore trop dur pour elle. Elle ne pouvait voir ces lieux où les siens avaient péris. Peut-être, un jour, à l'aube de sa vie... Mais ce cauchemars la tiendra jusqu'à la fin de ses jours.

JeanneA l'époque, dans les années 1935, l'Espagne sortait d'une violente guerre civile. Franco était au pouvoir et avait orchestré de nombreux massacres. Allié d'Hitler, qui lui avait fourni des armes qu'il voulait "tester" avant de déclarer la guerre à l'Europe. Guernica a été détruite avec des armes nazies. Bombardée, ensanglantée, réduite à néant.

Elle regarda un moment la jeune femme puis reprit doucement, resserrant son châle sur ses épaules.

JeanneL'Espagne avait assez de Franco pour avoir en plus à s'occuper d'Hitler. C'est pour cette raison que le pays n'a pas été pris de la même façon dans la guerre... L'Italie était dans la même position. Les loups ne se mangent pas entre eux.

Elle s'interrompit pour boire à nouveau un peu de café. A l'époque, Jeanne se souciait bien peu du reste du monde, trop occupée à survivre. Elle retint un soupir, les yeux dans la vague, puis reprit.

JeanneLorsqu'ils ont sentis la fin arriver, et la défaite, les nazis ont brûlés leurs documents, et voulus détruire les camps. Ils en ont fait exploser une bonne partie, notamment les chambres à gaz. Mais il reste des preuves q'on ne peut pas effacer si aisément.

Elle releva doucement sa manche, dévoilant le numéro noire qui était gravé à jamais dans sa peau. Le numéro si immonde dont elle avait longtemps eu honte, puis qu'elle avait réussi à surmonter et à laisser paraître sans plus s'en soucier. Il témoignait de sa survie et de sa force, pas de la honte. Elle n'était plus ce numéro qui l'avait privée de son statut d'être humain durant plusieurs années.

JeanneIl fallait une "bête noire". Un peuple qui serait responsable de tous les maux. Le mien a été la cible idéal car il s'est laissé faire. Je n'étais plus Française. Je n'était même plus humaine, pour eux. La mort était notre compagne.

Se baissant, elle retira un fichier bleu du sac qu'elle avait emporté, et en tira un document. C'était une litse, une très longue liste de numéros de matricules, dans une colonne. Il y avait une date en face de chacun d'eux. Le document était à moitié brûlé et rongé, craquelé par le temps. Elle le déposa sur la table fasse à Vanessa, tremblant légèrement.

JeanneCeci vient d'un des camps de concentration. Ces numéros correspondent chacun à un enfant. gazés dès leur arrivée à Auschwitz.
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MessageSujet: Re: Etude et documents   Etude et documents EmptyJeu 3 Juil 2014 - 13:26

Mme O’Venilli – A l'époque, dans les années 1935, l'Espagne sortait d'une violente guerre civile. Franco était au pouvoir et avait orchestré de nombreux massacres. Allié d'Hitler, qui lui avait fourni des armes qu'il voulait "tester" avant de déclarer la guerre à l'Europe. Guernica a été détruite avec des armes nazies. Bombardée, ensanglantée, réduite à néant.

Vanessa avait déjà entendu cette histoire, ce qui s’était passé à cette époque. Bien entendu, ce qu’on lui enseignait à l’école n’était un secret pour personne… Mais était-ce une raison pour dissimuler ce qui se déroulait dans les pays voisins ? C’était aussi pour cette raison qu’elle avait choisi la France, qu’elle effectuait de telles recherches. Elle refusait de vivre dans l’ignorance et voulait « rendre justice » elle aussi et pas exécuter simplement les lois comme certains se plaisaient à le dire. Fermer les yeux sur ce qui existe ne fait pas disparaître le problème. Vanessa prenait des notes sur ce que disait Madame O’Venilli, s’intéressant surtout aux mots qu’elle employait. Convaincue que la vieille dame utilisait les mots qui lui convenaient, il lui serait intolérable de déformer ses propos.

Mme O’Venilli – L'Espagne avait assez de Franco pour avoir en plus à s'occuper d'Hitler. C'est pour cette raison que le pays n'a pas été pris de la même façon dans la guerre... L'Italie était dans la même position. Les loups ne se mangent pas entre eux.

Mais s’ils avaient agi… Vanessa ne put réprimer une grimace en entendant cela. En fin de compte, quoi que l’on dise, tout le monde est pareil. Dès que cela nous touche, nous ouvrons les yeux et voulons agir. Autrement… C’était selon ce point de vue que la jeune Espagnole éprouvait une certaine admiration pour Madame O’Venilli. Elle, plus que n’importe qui d’autre, devrait être dégoûtée et refuser d’aider qui que ce soit vu que personne ne l’avait aidée – certainement pas les Espagnols.

Elle-même n’arrivait pas à tourner la page sur ce qui s’était passé lorsqu’elle était plus jeune, gardant une sévère rancune vers les hommes qui s’en étaient pris à ses parents. Cette nuit-là, personne d’autre ne les avait aidés, faute de preuve. Buvant une gorgée du café apporté par le serveur pour se réveiller, Vanessa continua d’écouter attentivement.

Mme O’Venilli – Lorsqu'ils ont senti la fin arriver, et la défaite, les nazis ont brûlé leurs documents, et voulu détruire les camps. Ils en ont fait exploser une bonne partie, notamment les chambres à gaz. Mais il reste des preuves qu’on ne peut pas effacer si aisément.

Vanessa regarda avec une certaine réserve ce que lui montrait son interlocutrice. Elle n’avait pas envie de la mettre mal à l’aise à cause de son passé. Sur son bras était inscrit un numéro noir, une sorte de tatouage. La jeune femme en avait entendu parler lors de ses recherches et trouvait cela immonde. Les Juifs étaient considérés comme des numéros et rien d’autre, des numéros et seulement des numéros. C’était sans doute plus facile pour les éliminer… Comme si un tel acte pouvait être « facile ». Réprimant des nausées, Vanessa reporta son attention sur Madame O’Venilli.

Mme O’Venilli – Il fallait une "bête noire". Un peuple qui serait responsable de tous les maux. Le mien a été la cible idéale car il s'est laissé faire. Je n'étais plus Française. Je n’étais même plus humaine, pour eux. La mort était notre compagne.

Exactement ce que Vanessa avait pensé quelques instants auparavant. Elle essayait de ne pas porter de jugement sur ceux qui avaient fait tout cela, essayait de rester neutre, mais c’était extrêmement difficile. Observant Madame O’Venilli tirer quelque chose de son sac pour le poser sur la table, Vanessa fronça légèrement les sourcils en remarquant qu’il s’agissait d’un fichier bleu. Puis son cœur se serra en regardant ce qu’il contenait. Des numéros. Des noms. Des dates. Le document était ancien et à moitié brûlé, son état témoignant d’une certaine ancienneté. Avant même que son interlocutrice n’explique ce que voulaient dire ces numéros, cette liste, Vanessa avait compris et remarqua qu’elle tremblait.

Mme O’Venilli – Ceci vient d'un des camps de concentration. Ces numéros correspondent chacun à un enfant. Gazés dès leur arrivée à Auschwitz.

Dans un geste qui se voulait apaisant, Vanessa posa sa main sur celle de Madame O’Venilli avec un mince sourire – elle était on ne peut plus sincère. Peut-être cela pouvait-il choquer, mais telle était sa mentalité. Et puis, tout le monde sait que les Espagnols sont plus tactiles, cela n’entravait jamais la jeune femme dans ses discussions. Vanessa regarda les numéros, consultant le fichier que lui avait donné Madame O’Venilli.

Restant silencieuse un long moment, le temps de regarder et de laisser son interlocutrice se reprendre, l’étudiante but d’autres longues gorgées. Le mal de tête refusait de passer et elle ne se sentait pas mieux, que du contraire. Elle ignorait ce qu’elle avait attrapé, mais ce fichu truc allait la clouer au lit plusieurs jours si cela continuait. Redressant la tête après un moment, Vanessa demanda prudemment :

Vanessa – Comment avez-vous fait pour… continuer ? Pour « tourner la page » et ne pas haïr toutes les personnes que vous côtoyez ? Avez-vous gardé contact avec d'autres personnes de votre passé ?

Vanessa ignorait si sa question était claire, maîtrisant légèrement moins bien les langues étrangères lorsqu’elle était malade ou fatiguée. Pour l’instant, cependant, elle refusait de l’admettre et ne s’avouait pas vaincue, reprécisant ce qu’elle voulait dire :

Vanessa – J’ai interrogé quelques personnes. Dans leurs paroles, je ressentais toujours de la haine… Peut-être une haine infime, qu’elles voulaient cacher par peur des représailles ou d’être jugé. Mais dans vos paroles… Vous êtes si calme, si… « sage »… Comment avez-vous fait ? Si vous voulez bien me le dire, sinon dites-le, ne vous sentez surtout pas obligée.
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