[HC et suite de "Se venger d'Aro"] Une discussion s'impose.

Peut-être que seulement quelques jours s'étaient passés. Peut-être des semaines. peut-être des mois. Elle n'en savait rien. Le temps coulait désormais sur elle sans l'atteindre, et elle ne s'en souciait guère. Les heures qui s'écoulaient se confondaient entre elles, n'apportant que leur lot de souffrance et de regret. Où elle était, avec qui, pour combien de temps, quelle importance ?! Plus rien dans ce monde n'avait plus la moindre importance pour elle, désormais. C'était un monde sans saveur, vide, glacial, et qui n'avait aucunement besoin d'elle. Elle voulait disparaître à son tour, s'évanouir, ne plus rien ressentir, partir loin d'ici. Dans un endroit sans souvenirs ni peine. Sans rien. Elle voulait mourir.

Le souvenir d'Alec l'obsédait littéralement. Elle ne pensait qu'à lui, nuit et jour, sans aucune autre pensée étrangère. Il envahissait chaque recoin de son esprit, et elle en désespérait. Lui mort, sa vie n'avait plus aucun sens... Elle avait toujours vécue pour lui, s'était battue pour lui, avait résisté pour lui. Uniquement pour lui... Et il était mort... son absence la déchirait littéralement, autant qu'elle le refusait. Il était parti, parti loin d'elle, et elle ne l'acceptait tout simplement pas. Il l'avait quitté, alors qu'ils avaient toujours marchés main dans la main. Que pouvait-elle faire, maintenant sans son frère, sa moitié, son jumeau ?

Des bras se glissèrent tout à coup autour d'elle, et elle crut avoir une hallucination. Mais ce n'était que Esmée. Esmée, Esmée Cullen, qui venait de la prendre dans se bras et la berçait. Jane retomba peu à peu dans son apathie. Qu'elle joue, elle aussi, peu importe... Que les Cullen la laissent en paix, qu'elle disparaissent en silence, ça ne troublera personne.

Esmée -« Écoute, vouloir te venger d’Aro ne servira à rien. Tout ce que tu gagneras c’est la mort… »

La mort... Si douce perspective à ses yeux. La mort lui tendait les bras. Jane rêvait qu'elle vienne et l'emporte dans ses ailes noires. Qu'elle l'emmène si loin, là où elle reverra Alec. Elle l'attendait, l'appelait de toute son âme. Elle voulait que la mort daigne venir jusqu'à elle, passe la chercher définitivement. Elle voulait partir à son tour. Elle ne pouvait rester ici, seule, sans son frère.

Esmée -« Caius t’a menti, tu ne dois pas le croire, Alec t’aimait, oui. Mais… Il n’était pas le seul. Beaucoup de monde t’apprécie, Jane. Nous, par exemple, crois-tu que l’on t’aurait rattrapé ou qu’on essaierait de t’aider si on ne t’appréciait pas ? »

Ils pouvaient faire ça par jeu, ou elle ne savait quoi... Au plus profond d'elle, elle savait que Caïus avait dit vrai. Elle l'avait suffisamment vécu au quotidien. Elle en avait assez vu pour savoir que non, elle n'avait personne d'autre que son frère, en ce monde. Personne d'autre qu'Alec.

Esmée -« On tient à toi, Jane. On a appris à t’apprécier… À vous apprécier tous les deux, même si c’est dur à croire, c’est le cas. »

Ils ne les connaissaient pas. Ils n'avaient vu Alec qu'une ou deux fois. Elle, peut-être plus longtemps, mais ils n'avaient pas appris à la connaître pour autant. Ce n'était pas possible. Et ils venaient de deux mondes trop différents, trop opposés. De toute façon, les Cullen ne pouvaient pas l'apprécier, alors inutile d'en parler. C'était ainsi. Il ne servait à rien de se battre contre cette réalité, juste l'accepter. Et il s'agissait d'un sujet si insignifiant à côté de la disparition de son frère...

Esmée -« Quant au fait qu’il ait dit que, même à quatre ans on te considérait comme une sorcière, ça, je ne sais pas te dire le contraire, je n’étais pas là. Mais ce que je sais, c’est que tu n’es pas la même, ce que tu as vécue tu’as changé. Il existe des bonnes et des mauvaises sorcières. Et ton don n’en fait pas de toi une. Vous êtes normaux, et vous avez juste développé des aptitudes différentes et rares. Ce qu’on ne comprend pas nous effrayait. Et c’est encore d’actualité, même si c’est moins fort de nos jours. »

Jane n'écoutait quasiment plus. Était-elle une sorcière ? Oh, oui, sans doute. Elle pouvait foudroyer quelqu'un de douleur juste en le regardant et y prenait plaisir. Aro lui avait appris à torturer et tuer sans aucun état d'âme. Elle se battait avec les autres depuis des siècles. Elle brûlait les autres sans sourciller, ça faisait sûrement d'elle une sorcière. Ou juste une Volturi.

Esmée -« Il est tout à fait normal que tu souffres de la mort d’Alec. Et… Caius est horrible de t’avoir dit ça à propos de son décès. Mais il est cruel, et tu le sais bien mieux que moi. Il voulait juste te faire du mal et c’est servi de ça pour t’en faire, pour t’anéantir encore plus. Alec est mort, et… C’est horrible, je sais, mais… Te tuer en essayant de le venger vainement ne le ramènera pas, Jane. »

Non... Mais elle pourra mourir en paix, rejoindre son frère ! Faire souffrir autant Aro autant qu'elle souffrait elle-même. Elle se fichait bien de continuer à vivre ou non. Elle voulait se venger.

Esmée -« Je ne te mens pas, Jane. C’est vrai que nous tenons à toi. Tout ce que je t’ai dit est vrai, et je pense que tu le sais.»

- Mais vous ne me connaissez même pas, marmonna-t-elle.

Elle se dégagea de l'étreinte d'Esmée et se leva, fit quelques pas vers la fenêtre, puis se tourna vers la mère des Cullen. Elle était soit pleine de bonnes intentions, soit elle ne voulait que l'enfoncer un peu plus. Peu importe. A ce moment, Jane ne se souciait même plus que tous les autres pouvaient entendre la conversation.

- Comment vous pourriez m'apprécier ? lâcha-t-elle finalement. Caïus a raison, sur ce point... Vous, vous êtes une famille tranquille, végétariens avec ça, et vous ne faites de mal à personne. On n'est pas du même monde, si je peux dire. C'est Aro qui m'a élevé... J'ai appris à tuer et torturer sans sourciller. Vous ignorez ce qu'est la vie là-bas.

Elle recula encore jusqu'à la fenêtre, sans quitter Esmée du regard.

- Je me fiche de mourir. Bien au contraire. Et puisque je suis une sorcière, j'ai un moyen, d'atteindre Aro.

-Jane- « Mais vous ne me connaissez même pas »

Un simple marmonnement. Esmée n’attendait qu’une réponse, une réaction. Mais… Elle ne s’attendait pas à ce genre de réaction, même si… Bref. Avait-on besoin de réellement connaitre quelqu’un pour l’apprécier ? Après tout… Quel sens avait ce mot ? Il avait tellement de sens, de contresens et de définition qu’il était impossible de connaître entièrement quelqu’un. Elle connaissait son nom, son âge approximatif et savait qu’elle venait de subir une perte bien plus horrible qu’elle ne pourrait un jour le comprendre. Elle n’avait pas de frère jumeau, et ne pouvait pas comprendre ce lien. Mais… Qui avait-il de difficile à assimiler dans le fait qu’elle appréciait Jane. Même si elle ne la connaissait pas ?

Jane s’était dégagée de l’étreinte qu’elle lui avait donnée pour finalement se diriger vers la fenêtre et la fixée…

-Jane-« Comment vous pourriez m'apprécier ? Caïus a raison, sur ce point... Vous, vous êtes une famille tranquille, végétariens avec ça, et vous ne faites de mal à personne. On n'est pas du même monde, si je peux dire. C'est Aro qui m'a élevé... J'ai appris à tuer et torturer sans sourciller. Vous ignorez ce qu'est la vie là-bas. »

Que dire de plus ? Tout était dit. Elle ne voulait pas accepter qu’on puisse, hormis son frère, tenir à elle ? Que dire pour l’en convaincre ? Que faire ? Esmée soupira.

Elle ne parla pas, laissant Jane poursuivre, tout en cherchant que dire pour la convaincre. Oui, elle ignorait ce qu’était la vie à Volterra. Elle ne pouvait pas le savoir, sachant qu’elle n’avait pas vécu à Volterra… Esmée se perdit bien vite dans ses pensées. Elle savait que, d’une certaine manière, Jane avait raison… Mais… Pas entièrement. Esmée fut sortie de ses songes par Jane, qui recommençait à parler.

-Jane-« Je me fiche de mourir. Bien au contraire. Et puisque je suis une sorcière, j'ai un moyen, d'atteindre Aro. »

-« Bien. Tu t’en fiche de mourir ? Et tu crois que ta mort va apporter quoi ? Tu auras vengé Alec, oui. Mais… Tu n’auras, au final rien fait…Enfin, pas grand-chose. Tu dois te douter que tu n’en sortiras pas vivante. Bien que tu t'en fiche, ça ne changeras pas la finalité de l'histoire...»

Elle soupira.

-« Bref, je sais que tu t’en fous. Mais tu ne vas que t’attirer des ennuis. Et... Peu importe ce que je vais te dire, tu trouveras à le démentir. Mais tu ne sais pas ce que je pense de toi, et tu ne peux pas savoir ce qu’on pense de toi, pas vrai ? »

Parler comme ça n’était sans doute pas une bonne idée, mais… C’était vrai. Elle poussa un grand soupir, puis reprit.

-« En bref, tu n’as pas choisi d’aller chez les Volturi. Tu n’as pas choisi tout ça. Donc, je ne vois pas pourquoi tu ne mériterais pas d’être appréciée, d’être aimée pour ce que tu es réellement. Parce que je ne doute pas que tu aies un bon fonds, Jane. La preuve ? Si tu n’avais pas un bon fond, tu ne serais pas autant touchée par le décès d’Alec, qu’il soit ton jumeau ou non.»

Elle posa son regard sur le sol, réfléchissant.

-« Tout le monde peut être sadique, prendre plaisir de la souffrance des autres. Mais ne viens pas me dire que, parce que tu aimes bien faire ça, tu ne mérites pas qu’on te prenne en considération, Jane, que l'on ne puissent pas t'apprécier à cause de ça ! Tu en as tout autant le droit que tu as aussi le droit à l’erreur. Nous l’avons tous. »

Esméée -« Bien. Tu t’en fiche de mourir ? Et tu crois que ta mort va apporter quoi ? Tu auras vengé Alec, oui. Mais… Tu n’auras, au final rien fait…Enfin, pas grand-chose. Tu dois te douter que tu n’en sortiras pas vivante. Bien que tu t'en fiche, ça ne changeras pas la finalité de l'histoire...»

Oui, et donc ? Ce ne sera pas une tragédie qu'elle meure à son tour, après tout. Juste une finalité, la suite logique de ce qui devait maintenant se passer. La fin, rapide, sans plus attendre. Elle n'avait plus rien à faire sur cette terre. Plus rien. Pas sans Alec... Que pouvait-elle faire, de toute façon, seule ? Où allait-elle ? Les Cullen  n'allaient pas la garder avec eux éternellement. Il arrivera un moment où ils seront lassés, peu importe leur raison d'agir ainsi, et l'abandonneront. Elle ignorait totalement où aller, que faire, en attendant d'avoir recouvré assez de de forces pour se venger. Elle ne savait pas vivre seule. Son frère avait toujours été là, et cette découverte si violente de la solitude la laissait anéantie. Elle voulait mourir, le rejoindre, ne plus espérer, même si elle savait que c'était inutile.

Esméée -« Bref, je sais que tu t’en fous. Mais tu ne vas que t’attirer des ennuis. Et... Peu importe ce que je vais te dire, tu trouveras à le démentir. Mais tu ne sais pas ce que je pense de toi, et tu ne peux pas savoir ce qu’on pense de toi, pas vrai ? »

Comment ça... ? Que voulait-elle dire, où voulait-elle en venir ? Jane avouait qu'elle avait du mal à la suivre, pour le coup. Non, elle ignorait ce qu'on pensait d'elle, mais ce n'était pas très difficile à deviner non plus. Il s'agissait de mots qu'elle avait entendu de nombreuses fois, et plus récurrent était "sorcière". Alors si, elle pouvait savoir ce qu'on pensait d'elle. Le deviner. Ou le ressentir. Mais elle devait admettre qu'Esmée n'avait pas, comme tous les autres, cette lueur de haine ou de peur dans le regard. C'était autre chose, d'opposé, qu'elle ne parvenait pas à définir. elle ne le pouvait pas. elle connaissait bien la haine, ainsi que la peur. Elle avait connu l'amour et le lien fraternel. Elle ignorait tout de la pitié ou de la compassion. Avec Alec, ils ne compatissaient pas, ils agissaient et se soutenaient l'un l'autre en cas de coup dur. Pas de pitié non plus, jamais. Pas de résignation. C'était leur mot d'ordre. Pour survivre, il ne faut jamais se résigner.

Esméée -« Tout le monde peut être sadique, prendre plaisir de la souffrance des autres. Mais ne viens pas me dire que, parce que tu aimes bien faire ça, tu ne mérites pas qu’on te prenne en considération, Jane, que l'on ne puissent pas t'apprécier à cause de ça ! Tu en as tout autant le droit que tu as aussi le droit à l’erreur. Nous l’avons tous. »

Pas sûr. A Volterra, l'erreur n'était pas tolérée. Jane se laissa glisser contre le mur et se retrouva assise par terre, entourant ses jambes de ses bras. Le monde lui semblait vide et glacial. Si grand, et pourtant déserté. La seule personne qu'elle aimait vraiment avait disparu.

- Qu'est-ce que vous voulez que je fasse, de toute façon ? murmura-t-elle. Il va bien arriver un moment où vous allez m'abandonner, c'est naturel. Et à ce moment-là, il faudra que je disparaisse à mon tour. C'est la suite logique des choses.

Sa voix avait tremblé. L'abandon était inéluctable, elle en était consciente, mais cela l'effrayait plus que tout. Tout comme la solitude. Elle ne voyait pas comment vivre alors qu'elle avait perdu la moitié d'elle-même. Elle se releva et sortit de la chambre, marchant sans regarder où elle allait, et se cogna tout à coup contre quelqu'un. La vue assez brouillée, elle crut revoir sa mère, comme surgit d'entre les morts, et lui attrapa donc la main et la serrant.

- Tu m'emmènes ?

Maman - Où ?

Elle avait eu un mouvement de recul. Jane sursauta légèrement avec ce geste, blessée à vif, puis se retourna et s'enfuit dans le couloir, sans se soucier de l'endroit. Même sa mère l'avait rejeté. Voilà bien la preuve... Elle quitta la maison et s'enfonça dans le bois derrière, voulant se cacher. Disparaître.