Catéchisme pour jumeaux névrosés !

Le catéchisme… Pourquoi devait-il encore s’occuper de cela ? Dans toute bonne paroisse une maman, alors appelée dame catéchisme, s’occupait de cela. Ce n’était pas le rôle du vicaire de la paroisse. Le catéchisme était bien la seule chose qui rebutait le jeune Duncan. Garder une dizaine de gosses qui n’en avait rien à foutre du Christ et tenter de leur faire saisir un tant soit peu de la beauté de la foi catholique… Les mioches ne s’y intéressaient pas. La seule chose qui les contentait était le match de foot qui avait lieu à la pause dès deux heures habituelles de catéchèse.

Le catéchisme… Pourquoi donc le jeune Duncan Maccampbell avait-il accepté cette charge si chiante ? Il aurait largement préféré passer deux heures au confessionnal à écouter les petites vieilles raconter comment elle avait osé pécher en mangeant un petit carré de chocolat en plein milieu du carême, ou alors les couples adultères venant chercher le pardon de Dieu faute d’avoir obtenu celui de leur conjoint ou conjointe. Non, la pénitence était tout de même plus divertissante que la catéchèse. Il n’y avait vraiment pas photo aux yeux du jeune prêtre. Alors passer deux heures à perdre son temps au lieu d’écouter les potins mondains du quartier était vraiment une perte de temps. Car oui, confesser permettait aussi d’apprendre tous les détails de la vie des paroissiens. La jalousie et l’envie étaient surement les péchés qui rapportaient le plus de ragots paroissiaux.

Enfin passons donc cela, Duncan n’avait de toute façon pas le choix. Il devait se rendre dans la salle de catéchisme et supporter les mioches prépubères qui n’avaient pas encore assez d’autonomie pour colorier correctement sans dépasser les lignes d’un dessin tellement simple que même un séminariste de premier cycle pouvait le colorier les yeux fermés. Et pourtant ces derniers n’étaient pas très futés lorsqu’il s’agissait de choisir entre l'encens pontifical et à la rose en présence d’un prélat ou autres prince de l’Église… Ne parlons même pas de la bêtise de certain ne sachant pas faire la différence entre un corporal, un manuterge, un purificatoire et une pâle… Ah… Ces deux heures allaient vraiment être longue, chiante et calvérifique.

Duncan arrêta de maugréer deux secondes pour se rendre dans l’immense salle de cours sentant le renfermé. Elle n’avait pas dû être aérée depuis la dernière séance de catéchèse. Le gout du curé pour la décoration n’était vraiment pas développé. Les papiers peints de la salle d’un rose bonbon évoquaient gentiment les dimanches de Laetare et de Gaudete. Le tableau d’un noir criard n’avait pas non plus été nettoyer. La seule chose qui calma Duncan fut la vision d’un beau crucifix en bois évoquant un Christ souffrant. Voilà bien la meilleure représentation de l’enfer que le prêtre n’allait pas tarder à vivre. Non décidément cette salle n’arrangeait rien à l’envi du jeune prêtre de s’enfuir rapidement de la pièce pour se rendre dans le silence de la chapelle du sacrement. Cependant voilà, son devoir d’état l’obligeait à rester ici. Mais bon le Seigneur lui-même avait dû subir la passion avant de ressusciter d’entre les morts…

Le vicaire s’approcha du bureau qui lui était assigné et ouvrit doucement un des tiroirs. Un fouet à lanière plutôt longue y séjournait encore. Les anciennes méthodes étaient peut-être la seule solution pour faire comprendre aux enfants le calvaire qu’ils allaient vivre s’ils n’adhéraient pas à la foi catholique de la Sainte église Romaine. Dans un deuxième tiroir se trouvait un magazine d’objet liturgique en tous genres. Duncan le feuilleta deux secondes en s’attardant bien sûr sur les soutanes noires et les surplis en dentelle. Le jeune vicaire corna le bord d’une page pour marquer l’endroit ou un attribut liturgique lui avait sauté aux yeux. Il irait l’acheter après la séance de torture. Après tout comme disait un vieux proverbe français: « après l’effort, le réconfort ! »

Le calme fut malheureusement brisé par l’arrivée des premiers enfants. Seulement huit mioches avaient répondu à l’invitation de la paroisse à venir user les bancs de la salle de catéchisme. Une dizaine de parent avaient donc osé défier le curé en refusant de faire venir leur enfant. La sécularisation était bel et bien un problème. Les laïcs semblaient penser que la vie sans Dieu était possible. Alors que c’était comme exposait une feuille à une flamme puissante. La feuille disparaissait très vite, un peu comme la pureté et le Salut des fidèles adhérents au capitalisme et à la laïcité comme à une nouvelle religion. Les ravages du communisme venaient seulement d’être soigné qu’un nouveau dictate empêchait les gens de contempler la seule vérité qu’était le Christ.

Duncan: - Merci bien mes enfants d’être venue. Nous allons commencer la séance par une dizaine de minutes de silence à genoux devant la croix de notre Seigneur Jésus. Ainsi vous pourrez peut-être ouvrir votre esprit à la douloureuse passion que je… que le Christ vit à chaque fois que vous péchez. Car ne l’oublier pas, Jésus est crucifié à chaque fois que vous commettez une faute !

Le jeune prêtre se releva au bout d’un quart d’heure. Le rajout de cinq petites minutes allait peut-être leur faire comprendre que le jeune vicaire n’avait pas vraiment envie de plaisanter avec eux. Duncan se dirigea doucement vers son bureau et fit l’appel de tous les enfants. Il y avait deux petits nouveaux. Une petite blonde a l’air névrosé et un enfant lui ressemblant. Ce dernier avait plutôt l’air d’avoir envie de bouffer quelqu’un dans la pièce. À croire que ces deux mioches n’avaient aucun savoir vivre, aucune sociabilité. Duncan sourit doucement et décida de tester leur connaissance. Il s’approcha alors de la petite blonde (Jane) et lui posa deux trois questions simples:

Duncan: - comment vous appelez vous ? Avez-vous été baptisé ? Récitez- moi trois prières usuelles de la Sainte Église catholique et en latin bien sûr !

Alec lui serrait fortement la main, et ce fut sas doute la seule chose qui l'empêcha de bondir pour égorger chacun des gamins qui se trouvaient en face d'eux. Cette après-midi avait pourtant si bien commencés ! Le temps était couvert, le château calme, Démétri et Félix s'étaient installés dans un coin du domaine pour bavarder tranquillement sans leur demander de venir, Orlin était occupé ils ne savaient où, ils avaient donc pu sortir un peu dans Volterra, se balader, respirer un peu l'air de la ville. Ces moment juste à eux deux étaient très précieux, pour Alec et elle. Ils pouvaient se confier l'un à l'autre, parler de tout loin des oreilles indiscrètes, ou rester simplement assis, tranquilles, dans un coin de la ville, ou sur les remparts. Cette ville qu'ils connaissaient si bien, maintenant. Malgré tout ce qui s'était passé, Volterra représentait toujours une enclave protégée, une paix. On ne pouvait les atteindre ici.

Et il fallut que ces quelques gamins humains viennent leur chercher des noises. Ils étaient du même âge qu'eux, et avaient d'abord voulu les pousser à jouer au ballon avec, profiter de cette après-midi pour se défouler. Devant leur refus, ils s'étaient mis à railler les "enfants du château", qui ne voulaient jamais se mêler à qui que que ce soit et qui restaient dans leur coin. Et ça partait en vrille. Cependant, comme tout le monde le savait, la patience de Jane avoisinait le degré zéro, d'autant plus lorsque l'objet de son courroux s'avérait être un humain. Seule la présence de son frère l'empêchait de tous les massacrer un par un par et dans d'atroces souffrances. Elle se calmait peu à peu lorsqu'une grosse bonne femme arriva et leur dit qu'il était l'heure du cours d'elle-ne-savait-quoi, tant elle était occupée à chercher à filer avec son frère.

Humaine - Eh ! Non, vous deux, ce n'est pas par là !

Jane s'apprêtait à protester, à répliquer qu'ils n'avaient rien à faire dans un cours, quel qu'il soit, mais la bande de mioches les encercla tout à coup et les poussa avec eux, criant qu'ils devaient se mêler aux autres, et qu'il y avait un match de foot prévu à la pause, en plus, et un goûter à la fin. Ils durent suivre le mouvement, sous l'accord enthousiaste de la bonne femme qui s'émerveillait que les enfants "de là-haut" se mêlent enfin à leurs petits camarades.

- Je sais qu'on a pas le droit de tuer les habitants de la ville, murmura-t-elle si bas que seul son jumeau l'entendit. Mais tu crois que Aro nous en voudra beaucoup si on fait une petite exception ?

Son humeur, déjà loin d'être au beau fixe, s'assombrit encore lorsqu'elle découvrit quelle était le fameux "cours". Elle retint un grognement, sentant la main de son frère se resserrer sur la sienne. Religion. Ils allaient avoir un cours de religion. Son don s'enflamma presque aussitôt à elle, à telle point qu'elle aurait pu brûler d'un regard le crucifix en bois lamentablement cloué au mur. Elle éprouvait pour la religion catholique une haine aussi violente que profonde. Une haine que les siècles n'avaient pas réussi à apaiser, bien au contraire. Une haine qui s'exprimait dans toute la puissance de son don. Dans ce feu qui était né du feu du bûcher. Elle échangea un long regard avec Alec alors qu'ils entraient. Elle savait que lui aussi devait se contenir, pour ne rien dire. Ils ne devaient pas attirer l'attention des humains.

La porte se referma derrière eux, sur une salle puant le vieux et le renfermé, à l'image même de cette très chère Eglise si honnie. Ironique, comme situation. Un prêtre de mauvaise humeur, vu son odeur, enfermé avec six gosses biens humains qui se fichaient de tout cela, et deux gosses qui n'avaient plus rien d'humains, censés être morts depuis des années de la main de la chère Eglise qu'il servait. Elle l'observa, caressant l'idée de le torturer dès maintenant, après avoir fait disparaître les témoins. Si cela ne tenait qu'à elle, voilà longtemps que les prêtres auraient été inscrits sur la liste des espèces menacées.

Prêtre - Merci bien mes enfants d’être venus. Nous allons commencer la séance par une dizaine de minutes de silence à genoux devant la croix de notre Seigneur Jésus. Ainsi vous pourrez peut-être ouvrir votre esprit à la douloureuse passion que je… que le Christ vit à chaque fois que vous péchez. Car ne l’oublier pas, Jésus est crucifié à chaque fois que vous commettez une faute !

Heureusement qu'elle ne pouvait plus périr d'ennui. Elle fit comme les autres, ses pensées divaguant vers les souvenirs qu'elle gardait de la religion. Procès en série, archidiacres vindicatifs, croix de bois de deux mètres, agitées devant les bûchers, cardinaux hurlant leurs imprécations... Tout une époque de chasse aux sorcières, des milliers d'arrestation et d'exécutions, par pendaison, noyade, brûlure, torture. Une époque sanglante, où des familles toutes entières étaient décimées. On se débarrassait d'abord des parents, puis dès que leurs enfants atteignaient l'âge minimum légal pour être assassiné, soit onze ans, on s'occupait d'eux à leur tour. Jane lança un regard ironique au christ de bois. Les jumeaux en sorcellerie étaient juste sous son nez, toujours vivants malgré la toute-puissance de l'Eglise.

Ils finirent par se lever et allèrent s'asseoir avec les autres. Elle tapota des doigts sur la table, de plus en plus agacée. Devait-elle tuer le prêtre tout de suite où brûler d'abord la classe ? Il s'approcha tout à coup d'elle avec un sourire écœurant. Quoi encore ? S'il jamais il lui demandait de parler de sa Foi, elle l'étripait, habitant de la ville ou pas.

Prêtre - Comment vous appelez-vous ? Avez-vous été baptisée ? Récitez-moi trois prières usuelles de la Sainte Église catholique et en latin bien sûr !

Elle lui jeta un regard incrédule. Il se fichait d'elle ? Elle ignorait si elle avait été baptisée, mais c'était quasiment certain vu l'époque à laquelle elle était née. En revanche, ce qui était certain, c'est qu'elle avait été excommuniée depuis très longtemps, tout comme son frère. Comment allait-elle réagir si elle lui sortait cela comme ça ? "J'ai été baptisée il y a plus de trois siècles et excommuniée douze ans plus tard parce que je suis une sorcière."

- Je m'appelle Jane Volturi, finit-elle par murmurer, ignorant s'il allait faire le lien avec les maître de la ville. Et oui, je suis baptisée.

Terme qui n'avait strictement aucune valeur à ses yeux. La Foi était loin, tout comme l'image de Dieu. Elle ne se mettait plus à genoux pour lancer un appel dans le vide. La découverte de son pouvoir, la mort omniprésente, le bûcher, tout cela n'avait fait naître que la haine. Haine pour la religion, haine pour les prêtres. Haine pour ce jeune prêtre idiot, si fier de son Eglise, malgré son Histoire.

- Et comment vous voulez que je puisse vous récitez des prières ? reprit-elle en soupirant. Je n'en connais aucune, encore moins en latin.

Elle haussa les épaules, pour montrer tout le bien qu'elle pensait de tout cela. Son regard s'était encore assombrit, plus dur que jamais. Les dernières prières qu'elle avait entendu étaient celles qu'avait hurlé 'archidiacre, alors qu'ils brûlaient vifs, juste avant que Aro ne les sauve et les morde.

- Vous pouvez bien les réciter vous-même, si ça vous amuse.

Impertinence… Impertinence de la jeunesse… Voilà bien ce qui pouvait qualifier la réponse de la jeune fille se trouvant en face de lui. Comment ses parents avait-il pu oublier de lui apprendre les prières de base du chrétien ? Comment pouvait-elle avoir si peu de considération pour les choses sacrées ? Duncan ne savait pas vraiment ce qui le retenait de sortir de ses gonds pour faire comprendre à la petite mioche qu’elle n’était pas moins concerné que les autres monstres présents dans la pièce dans les affaires spirituelles. Son âme avait autant de chances que les autres d’aller en enfer à la fin de ses jours si elle ne se convertissait pas de suite à la foi catholique. Non cela était vraiment d’un ridicule. Comment une enfant même blonde pouvait-il avoir un tel dédain pour le Seigneur et sa douce miséricorde ? Pour le Seigneur et sa douce passion sur la croix rachetant l’homme au prix de son sang ?

Duncan: - Ne pas connaitre les principales prières est un acte de rébellion voire d’apostasie jeune fille. Il y a quelque siècle vous seriez aller au bucher pour cela. Mais heureusement pour vous et pour moi aussi d’une certaine manière, l’Église a renoncé à pratiquer l’inquisition. Aussi, vous pouvez être rassuré, vous ne connaitrez jamais de votre vie le bûcher. Aussi arrêtez de prendre une dégaine de meurtrière ou plutôt d’adolescente prépubère voulant se prendre pour ce que vous n’êtes pas. Et dans ma grande clémence, je vais tenter de faire entrer dans votre petite caboche les principales prières que nous avons reçu de notre Seigneur Jésus-Christ lui-même. Je me demande simplement ce qui a bien pu traverser l’Esprit de vos parents pour qu’il ne désire pas vous inculquer les us et coutumes de la foi que vous avez reçue le jour de votre baptême.

Duncan se retourna doucement et se rapprocha de son tableau. Il était peut-être préférable de reprendre la formation à zéro. Cela ne ferait pas de mal pour les petites têtes blondes servant de progéniture à ses paroissiens et cela mettrait peut-être un peu de plomb dans la cervelle de cette petite impertinente qu’était Jane Volturi. Après tout, son allure, son attitude, son accoutrement laissait à penser qu’elle ne désirait qu’une seule chose, la mort de toutes les personnes entrantes un tantinet dans son espace vitale.

Duncan: - Bon procédons de manière simple et cela afin que vous puissiez comprendre l’importance de la prière. Voici déjà la principale prière de l’Église, le Pater: Pater noster, qui es in cales sanctificetur nomen tuum adveniat regnum tuum fiat voluntas tua sicut in caelo et in terra. Panem nostrum quotidianum da nobis hodie et dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimittimus debitoribus nostris et ne nos inducas in tentationem sed libera nos a malo. Amen.

Duncan l’écrit doucement au tableau. Puis, une fois cela fait, il se rapprocha des deux nouveaux et d’un ton calme s’adressa au second.

Duncan: -Montrez donc plus d’enthousiasme que votre soeur. Présentez-vous rapidement puis réciter cette prière devant tout le monde. Et enfin pour finir, expliquez-moi ce que vous savez de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ.

Un petit rictus traversa le visage du prêtre. Cette journée qui avait commencé du mauvais pied tournait de plus en plus au massacre d’enfant. Il n’était d’habitude pas aussi méchant, mais les évènements de ces derniers jours ne l’aidaient pas vraiment à ressenti un tantinet de compréhension pour ses monstres qu’il devait éduquer à la foi.

Jane - Je sais qu'on a pas le droit de tuer les habitants de la ville, murmura-t-elle si bas que seul son jumeau l'entendit. Mais tu crois que Aro nous en voudra beaucoup si on fait une petite exception ?

Alec haussa doucement les épaules. Normalement, oui, c'était interdit, mais dans le cas présent, il n'était pas certain que Aro leur en veuille. Un cours de religion... Un cours de religion ! Alec avait serré la main de sa sœur pour la réconforter, l'encourager. Un cours de religion. Il imaginait sans peine la haine que sa jumelle devait ressentir en cet instant précis, à l'image de ce que lui-même ressentait. Une haine brûlante, dans tous les sens du terme. Ils avaient beau vivre en Italie, jamais ils ne pourront porter un regard clément sur le Catholicisme, malgré les siècles qui s'étaient écoulés depuis l'époque de la chasse aux sorcières. Il revoyait encore l'Inquisiteur, brandissant sa croix en criant des prières. Ce cinglé hystérique !

Ils entrèrent dans une sorte de salle de cours, et Alec fixa les autres gamins et le jeune clerc d'un air mauvais. Voyons. Six enfants. Un prêtre. Pas de quoi faire un bon repas, mais tout sera terminé en quelques secondes. Il les dévisagea tous longuement, un tic nerveux l'agitant. Il n'avait toujours pas lâché sa sœur, écoutant à peine les racontars du prêtre et tout ce qu'il pouvait baver comme conneries. Six enfants. Un adulte. Peu de choses, mais comment les tuer ? Doucement ou rapidement ? Ils pouvaient tuer rapidement les gosses - au moins - mais le prêtre, ce sera une autre histoire. Lui et Jane avaient déjà tué quelques prêtres, au cours de leur vie et de leurs petites virées à Rome et au Vatican. Cela avait toujours été de doux moments. Les rats en soutane noirs avaient payé pour leurs prédécesseurs du 17ème siècle.

Après la "prière", où Alec s'était juste concentrée sur sa jumelle en oubliant le reste, ils s'assirent dans la classe. Il consulta sa montre pour vérifier le temps qui restait. Tout ce cirque allait être bien long, et les mioches de cette salle pourront s'estimer très heureux s'ils rentraient vivants chez eux ce soir. Le jeune clerc s'avança tout à coup vers eux, et Alec se tendit aussitôt, méfiant. Il ouvrit la main sous le bureau, les dents serrés. Son don était peut-être moins rapide que celui de sa sœur, mais aucun des humains présents dans cette pièce ne pourra atteindre la porte. Ils étaient rapides, bien plus qu'ils ne pouvaient l'imaginer. Et les hurlements de ce prêtre jeune et idot rempliront cette classe si cela tournait mal.

Prêtre - Comment vous appelez-vous ? Avez-vous été baptisée ? Récitez-moi trois prières usuelles de la Sainte Église catholique et en latin bien sûr !

Alec cilla légèrement. Tiens, bonne question, ça, ils avaient été baptisés ? Vu l'époque, ils étaient très probable que oui. En revanche, ce qui était certain, c'est q'ils avaient été excommuniés. Il revoyait encore l'archidiacre leur cracher cela à la figure, hurlant qu'une sorcière et un sorcier n'avaient pas leur place dans la maison du Seigneur. Sans blague ? Le don de Alec effleura sa main, prêt à jaillir, alors qu'il sentait la colère sourde de sa jumelle. Elle se présenta du bout des lèvres, jouant encore le jeu, et il admirait sa patience. Lui ne voulait qu'une chose, quitter cette salle et tuer ce prêtre immonde. Tout en lui lui faisait horreur. Son air supérieur lorsqu'il parlait de la "Foi", la croix qu'il portait, sa tenue, tout. Il était un exemple même d'un des anciens Inquisiteurs, si pétris de leurs principes et de leur raison, persuadés d'agir pour le bien du peuple lorsqu'ils envoyaient des familles toutes entières au feu, à la corde ou la noyade.

Jane - Et comment vous voulez que je puisse vous récitez des prières ? reprit-elle en soupirant. Je n'en connais aucune, encore moins en latin. Vous pouvez bien les réciter vous-même, si ça vous amuse.

Il sourit légèrement. Bien, dit, grande sœur. Ils en avaient sûrement apprises, des prières, mais les siècles les avait effacés de leur mémoire. Lorsqu'ils avaient été transformés, Aro ne s'était pas soucié de leur apprendre à prier. Il s'était plutôt mis à leur apprendre à lire et à écrire. Alec se souvenait des heures passées à la bibliothèque, assis avec le chef des Volturi, qui les faisait déchiffrer des histoires courtes et leur faisaient tracer des lettres, d'abord en Anglais, puis en Italien. Ils avaient appris très vite, grâce à leurs facultés de vampires, ce qui n'était pas plus mal. Mais revenons au présent. Son don le démangeait. Simplement savoir qu'il y avait un prêtre en face de lui lui donnait envie de vomir. Il porta lentement les mains à l'insigne accroché autour de son cou, les crocs luisant de venin.

Prêtre - Ne pas connaitre les principales prières est un acte de rébellion voire d’apostasie jeune fille. Il y a quelque siècle vous seriez aller au bûcher pour cela. Mais heureusement pour vous et pour moi aussi d’une certaine manière, l’Église a renoncé à pratiquer l’inquisition. Aussi, vous pouvez être rassuré, vous ne connaîtrez jamais de votre vie le bûcher. Aussi arrêtez de prendre une dégaine de meurtrière ou plutôt d’adolescente pré-pubère voulant se prendre pour ce que vous n’êtes pas. Et dans ma grande clémence, je vais tenter de faire entrer dans votre petite caboche les principales prières que nous avons reçu de notre Seigneur Jésus-Christ lui-même. Je me demande simplement ce qui a bien pu traverser l’Esprit de vos parents pour qu’ils ne désirent pas vous inculquer les us et coutumes de la foi que vous avez reçue le jour de votre baptême.

Là, ce fut Jane qui le retint de faire aussitôt un massacre. Il parvint à faire rentrer le grondement sourd qui montait en lui, mais ce ne fut pas simple. Du calme. Du calme. Que croyait-il, ce parfait abruti ? Il voulait se suicider ? Il se rencogna dans sa chaise, lèvres pincées, fermant les yeux une seconde pour se concentrer. Cette chère Inquisition, elle revenait décidément dans beaucoup de conversations. Il se demandait quelle tête ferait ce type s'il voyait leurs pensées. Un bûcher au cœur de la nuit, un Archidiacre criant ses prières vers le ciel, l'Inquisiteur en tenue rouge et mauve avec une immense croix de bois. L'odeur du feu et de la peur. Il n'y connaissait rien, s'il pouvait en parler avec autant de légèreté !

Prêtre - Bon procédons de manière simple et cela afin que vous puissiez comprendre l’importance de la prière. Voici déjà la principale prière de l’Église, le Pater: Pater noster, qui es in cales sanctificetur nomen tuum adveniat regnum tuum fiat voluntas tua sicut in caelo et in terra. Panem nostrum quotidianum da nobis hodie et dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimittimus debitoribus nostris et ne nos inducas in tentationem sed libera nos a malo. Amen.

Et le procès qui précédait le bûcher ? Les arrestations ? La fameuse Question ? Les cris et les insultes ? Les jets de pierre ? La prison ? Les privations en tout genre ? La torture ? La privation de sommeil ? La peur de la foule, du village où vous viviez ? La haine des Inquisiteurs ? Le feu du bûcher ? La douleur ? La conscience extrême que l'on va mourir dans la pire des souffrances possibles ? Que savait-il de tout cela ? Rien ! Absolument rien ! Rien, sinon les histoires pathétiques et mensongères qu'on avait pu lui raconter, car telle était la volonté de l'Eglise, renier ses propres crimes, ou clamer qu'elle avait agit pour le plus grand bien. Le prêtre se rapprocha à nouveau, de sa table cette fois. Si jamais il recommençait à lui parler de l'Inquisition...

Prêtre - Montrez donc plus d’enthousiasme que votre sœur. Présentez-vous rapidement puis réciter cette prière devant tout le monde. Et enfin pour finir, expliquez-moi ce que vous savez de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ.

Il retint un soupir, puis daigna prononcer son prénom, d'une voix plus glaciale que la mort, puis se mordit les lèvres. Réciter une prière était tout simplement hors de question. Mais ce jeune humain n'allait sûrement pas les lâcher. Oh, et puis zut, après tout ! Il en avait assez, et il détestait qu'on provoque sa sœur. L'insulter elle, c'était s'en prendre à lui. Règle d'or qui dictait chacun de ses pas depuis sa naissance.

- Je ne pense pas pouvoir réciter votre prière, dit-il d'un ton très calme et détaché. Jane et moi avons été excommuniés il y a déjà longtemps de cela. Nous nous sommes retrouvés ici par un malheureux hasard, et nous nous en voudrions de polluer plus longtemps votre cours de notre présence.

Il lui jeta un regard glacial. Ce jeune prêtre ne connaissait rien à la vie, ni aux règles qui régissaient ce monde. Sa voix se fit bien plus dure par la suite, à mesure que la fureur l'envahissait.

- Quand au bûcher... Nous l'avons connu, en effet. Vous voulez une démonstration de ce que ça fait, lorsqu'on brûle vif ?

Depuis son arrivée sur cette paroisse, le jeune prêtre avait dû prendre en charge la catéchèse des enfants. C’était une partie du ministère de prêtre qu’il ne comprenait pas. Pour Duncan, cette mission n’était pas pour un jeune clerc récemment ordonné. De plus, le garçon n’aimait pas vraiment s’occuper des mioches. Ces humains miniatures n’avaient aucun respect pour le sacré. Ils ne venaient pas se confesser. Il ne venait à la messe que par obligation parentale. Sans entrer dans une généralité ou dans un raccourci rapide, Duncan se demandait comment faire comprendre aux enfants l’importance de la religion aujourd’hui. Comment leur faire comprendre la beauté du sacrifice de Jésus sur la croix ? Dans quelques jours, les chrétiens entreraient dans la Semaine Sainte. Semaine célébrant les derniers jours de la vie de Jésus sur terre, célébrant l’institution du ministère de prêtre, célébrant l’institution de l’eucharistie. Et bien sûr aucun de ses enfants n’avait conscience de cela. La réponse donnée par le frère de la blonde aux yeux révolver n’allait que confirmer cette hypothèse.

Alec: - Je ne pense pas pouvoir réciter votre prière, dit-il d'un ton très calme et détaché. Jane et moi avons été excommuniés il y a déjà longtemps de cela. Nous nous sommes retrouvés ici par un malheureux hasard, et nous nous en voudrions de polluer plus longtemps votre cours de notre présence.

Excommunié… Excommunié… Ce gamin avait-il conscience de la portée de ce mot ? De la puissance qu’il y avait derrière . L’excommunication était la plus lourde sanction donnée par l’Église. Il y a quelques siècles, la Sainte Inquisition et le Pape se faisaient un malin plaisir à utiliser ces bulles pontificales pour condamner toutes personnes étant un peu différent du reste de la population. Ces condamnations étaient alors souvent accompagnées de bûcher. Le rappel de cette période sombre fit pâlir le jeune prêtre. Une certaine honte l’habitait à l’évocation dans sa mémoire de cette période sombre de l’Église. Comment avait-elle pu tomber aussi bas ?

Alec: - Quand au bûcher... Nous l'avons connu, en effet. Vous voulez une démonstration de ce que ça fait, lorsqu'on brûle vif .

Le jeune prêtre comprit rapidement que cet enfant se foutait littéralement de lui. La colère s’empara rapidement de Duncan. Ce dernier leva doucement la main et hésita deux secondes à gifler le garçon qui était en face de lui. Non… Il n’avait pas le droit… Pourtant cela lui aurait permis de lui remettre les idées aux claires, de lui faire comprendre la portée de ses mots. De plus, cela ne servait à rien de traumatiser les autres enfants avec des inepties de ce genre.

Duncan: - Vous deux restez ici. Quant aux aux autres enfants, je vous permets de rentrer chez vous. La séance de catéchisme est levée.

Tous les enfants ne cherchèrent pas à comprendre et sortirent de la salle rapidement. Rentrant chez eux et criant de joie de finir leur leçon si rapidement. Quant à Duncan, il ne savait pas comment répondre, comment expliquer à ces deux abrutis qui étaient en face de lui qu’il ne pouvait pas avoir connu le bûcher…

Duncan: - Vous vous foutez de moi ? Vous croyez peut-être être drôle avec des remarques de ce genre ? Pourquoi seriez-vous excommunié ? Comment auriez-vous connu le bûcher ? Vous n’êtes pas née à une époque où l’Église pratiquait encore ce genre de chose. Vous n’êtes que des enfants, arrêtez de vous prendre pour des immortels, pour des personnes connaissant parfaitement l’histoire du monde.

La colère s’emparait de plus en plus du jeune prêtre. Ces deux diablotins présents devant lui n’avaient pas l’air de comprendre la portée de leur mot, de leur attitude.

Duncan: - si vous continuez comme ça, je risquerais de devoir rencontrer votre père. Comprenez-vous cela ? Ou êtes-vous trop stupide pour cela ?

Duncan retourna vers son tableau et broya une ou deux craies histoire de calmer ses nerfs. Il aurait été un peu mal placé de frapper un enfant. Le scandale ferait alors le tour de la presse locale et l’évêque ne manquerait pas de sanctionner le jeune Maccampbell… Non, cette solution n’était pas envisageable. Le jeune clerc se rapprocha à nouveau des deux enfants. Il prie une chaise et se posa en face d'eux.

Duncan: - Excusez moi. Je me suis peut-être énervé trop rapidement. La patience n'a jamais été une de mes vertus. Enfin vous verrez quand vous aurez mon âge. Profitons donc de votre jeunesse.

Duncan s'adressa à la jeune fille.

Duncan: - Depuis quand êtes vous donc ici ? Nous ne vous avions jamais vu à une séance de catéchisme et le peu de culture biblique que vous avez me prouve que cela n'est pas une priorité pour vos parents. Vous auriez simplement pu ne pas rentrer ici ? Non ?